Texte Jason Barlow
Le break de chasse one-off du musicien Jay Kay laisse sans voix
« Et si nous allions au pub? On peut prendre la 330 GT… » J’ai conduit bon nombre des voitures de Jay Kay en vingt ans que je le connais et il m’a lui-même conduit dans bien d’autres encore (souvent rapidement, toujours habilement). Mais la voiture en question est spéciale même à en juger pour les standards de cet homme – un break de chasse one-off Ferrari, l’une des plus impressionnantes Ferrari à la carrosserie revisitée dans cet obscur chemin de traverse de l’histoire de l’entreprise.
En voiture ? Mis à part se lancer du toit d’une auberge locale les pantalons en flammes, difficile de trouver une manière plus sensationnelle de faire son entrée.
Jay Kay, tête pensante du phénomène musical Jamiroquai – dont l’album (I)Travelling Without Moving(I) de 1996 vendu à 12 millions d’exemplaires rendait hommage à Ferrari sur sa couverture – est récemment devenu l’un des collectionneurs de voitures les plus astucieux au monde.
Outre les dépendances bordant son splendide manoir, dissimulé dans la campagne verdoyante à une heure de voiture au nord de Londres, la collection de Jay s’est élargie à tel point qu’il a récemment dû faire construire de nouveaux bâtiments pour accueillir les véhicules.
Les Ferrari – LaFerrari, Enzo, F40, 250 GT Lusso, et Scuderia 16M Spider parmi tant d’autres – résident dans un espace réservé à température contrôlée, nécessaire pour se prémunir contre l’inanition du climat britannique. Mais Jay n’a aujourd’hui rien contre l’idée de sortir sous la pluie, dans la 330 GT, et il tient à ce que je conduise.
À l’heure du test drive, Jay est depuis peu propriétaire du véhicule et il admet même avoir cette fois peut-être pris des risques. « Tu crois que j’ai perdu la tête ? » sourit-il. « Cette voiture ne plait pas à tout le monde. »
Elle est certainement insolite. Break de chasse, voiture familiale : un nombre incroyable de one-offs surprenantes parsème les anciens catalogues Ferrari, jusqu’à la 250 « bread van » commandée en 1962 par le Comte Volpi, propriétaire de la Scuderia Serenissima, une voiture dont l’aventure esthétique était davantage liée à l’aérodynamique qu’à l’aspect visuel.
Cette 330 GT à carrosserie Vignale brise de nombreux codes du design automobile, mais son manque de position et de proportion répond largement à la flamboyance italienne et à sa forte présence en cette fin d’années 60.
La 330 GT apparut pour la première fois au Salon de l’Automobile de Bruxelles en 1964, annonçant la nouvelle ère d’une élégance plus formelle dans le style des V12 Ferrari GT. Le châssis no. 7963 traversa l’Atlantique, jusqu’au quartier général de Luigi Chinetti dans le Connecticut.
Désormais bien établi en bras droit de Ferrari au États-Unis, c’est le fils de Chinetti Luigi Jr (plus connu sous le nom Coco) qui échafauda l’idée du break de chasse et collabora avec l’artiste Bob Peak pour arriver à ses fins.
La voiture finie arrive au Salon de Turin en 1968, où sa carrosserie allongée à deux tons et son vitrage audacieux étonnaient les spectateurs probablement à peine sortis du cinéma et encore sidérés par 2001: L’odyssée de l’espace.
Après Chinetti, la 330 GT wagon – dernière Ferrari à carrosserie Vignale qui a habillé plus de 100 des plus belles voitures de Maranello, y-compris trois vainqueurs de la Mille Miglia – passa quelque temps en France avant d’arriver en Angleterre.
Elle est presque aussi étonnante à conduire qu’elle ne l’est à la regarder, et lorsque ses triples carburateurs Weber sont amorcés, le V12 de 4 litres démarre dans le hurlement sonore et vigoureux pour lequel ces Ferrari des Années 60 sont renommées. Le tout semble plutôt bien harmonisé pour une one-off de prêt de 50 ans, et la conduite est spectaculaire.
Aussi loin que les Ferrari aillent, la 330 GT fredonne peut-être des airs insolites, mais comme Jay Kay sait mieux que quiconque, il s’agit probablement des airs les plus funky.