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Le trio Testarossa

La Ferrari Testarossa est un chef-d’œuvre des années 80. Ses évolutions, la 512 TR et la F512M, sont moins connues. Bien qu’ayant quelques ressemblances avec la voiture originale, les différences sont néanmoins bien plus que superficielles
Texte : Jason Barlow / Vidéo : Oliver McIntyre

Qui peut résister à l’envie d’empaqueter des dizaines d’années comme si c’était des d’objets facilement assimilables ? C’est inévitablement plus complexe que cela, mais la Ferrari Testarossa est et restera un symbole des années 80. Pininfarina, le designer partenaire de Ferrari, l’avait imaginée avec un nez bas, des grilles flamboyantes et des flancs larges ; il ne se contentait pas d’être dans l’air du temps, il l’accélérait. La nouvelle voiture, dont le nom est la contraction d’un ancien modèle célèbre, a été lancée en première mondiale au Lido, sur les Champs Élysées, avant le Mondial de l’Automobile de Paris en 1984. C’est une voiture qui a fait parler d’elle.

Regardez le trio Testarossa, 512 TR et F512 M en action sur route et sur piste…

Cette dernière née de la légendaire lignée des 12 cylindres Ferrari est l’une des plus grandes. Toutes ces voitures ont de nombreux points communs, mais la Testarossa a repris le flambeau là où la 365 GT4 Berlinetta Boxer et la 512 BB s’étaient arrêtées. Elle bénéficie d’une toute nouvelle injection électronique et d’un nouvel allumage, ses culasses à quatre soupapes permettent à son 12 cylindres à plat de 5,0 litres de déployer un total de 390 ch. Certaines exigences fondamentales d’ingénierie ont dicté sa forme épique : l’aménagement de la 512 BB était compromis par ses radiateurs montés à l’avant, ce qui a incité Ferrari à les déplacer sur le côté pour la Testarossa. Bien évidemment, cela s’est traduit par une augmentation des dimensions de la voiture, elle était en effet plus large de 152 mm à l’arrière que son prédécesseur. Cela a été aussi à l’origine de ce que l’on pourrait appeler une « opportunité » dans le domaine du design. D’où les prises d’air latérales inclinées vers le haut et les grilles de protection, les designers ont de fait doublé les proportions des contreforts et conçu un arrière particulièrement plat et large.

Ci-dessus : avec sa forme épique, ses magnifiques virures latérales et son moteur 12 cylindres à plat de 5,0 litres, la Testarossa méritait largement son statut de légende

C’était l’apogée du modernisme de Maranello dans les années 80, une voiture dont la forme presque caricaturale l’a rapidement fait entrer dans la culture populaire. D’ailleurs, une réplique de la Daytona Spider a été utilisée dans la première saison de la série Deux flics à Miami, Ferrari a par la suite fourni deux Testarossa monospecchios pour l’un des grands placements de produit. La nouvelle voiture est sortie quelques mois seulement après la GTO, mettant en avant ainsi le repositionnement subtil par Ferrari de son 12 cylindres haut de gamme aussi bien en tant que GT que supercar.

D’après les normes actuelles, il est intéressant de noter que la Testarossa ne semble pas aussi grande ou aussi compliquée que certains pensaient à l’époque de son lancement. Les sièges sont confortables et la direction non assistée s’assouplit au fur et à mesure que le rythme s’accélère. Changer de vitesse devient une action spectaculaire et pleine de caractère grâce à l’ouverture classique de la grille ouverte. Les pneus avant de taille modeste confèrent à la voiture un grand dynamisme dans les virages. Sa tenue de route à grande vitesse impose cependant le respect – comme c’était le cas avec la 512 BB – en raison de la taille du moteur, de sa position au-dessus de la boîte de vitesses et de sa configuration en position centrale.


Ci-dessus, de gauche à droite : le levier de vitesses à portail de la Testarossa faisait du changement de vitesse un véritable plaisir, tandis que sa forme était régie par des exigences techniques ; l'intérieur de la 512 TR a propulsé la voiture résolument dans les années 1990 ; la F512 M a perdu les phares escamotables de ses prédécesseurs

Ces sont des questions auxquelles s’est attaquée la 512 TR. Elle fut présentée en 1991 et se targuait d’une puissance augmentée à 428 ch, les ingénieurs de Ferrari ont jugé bon de monter le groupe motopropulseur 30 mm plus bas, de sorte à améliorer le centre de gravité et à optimiser le moment d’inertie polaire. Sa rigidité structurelle a également été améliorée, elle était équipée de plus grandes roues – remarquez leur design unique à cinq branches – et de pneus garantissant une expérience dynamique généralement plus précise. Les améliorations visuelles sont relativement subtiles, notons entre-autres son nez retravaillé et un carter de moteur partiellement noir. Pourtant, cette esthétique typique des années 80 est toujours d’actualité à l’aube de la nouvelle décennie. Elle était également plus facile à manier, son moteur plus puissant tournait à plus de 7 000 tr/min, le temps de réponse de l’accélérateur était un peu plus net, la répartition du poids plus conviviale. C’est la première Ferrari que j’ai conduite, la 512 TR occupe donc une place spéciale dans mon cœur. Mais c’était un bon point de départ, même si elle était plutôt impressionnante, elle est passée à l’histoire comme un Cheval cabré digne de ce nom.

Ci-dessus : la Ferrari 512 TR de 1991 était plus puissante que son prédécesseur et offrait une expérience de conduite légèrement plus dynamique

En 1994, la F512 M, comme Modificata (modifiée) fait son apparition. En raison de nouvelles règles de sécurité, elle perd ses phares escamotables caractéristiques au profit de quatre feux arrière ronds. Le moteur est équipée de bielles en titane et d’un taux de compression accru pour délivrer une puissance de 440 ch. Pour finir, son nouvel échappement en acier inoxydable vient sublimer l’expérience sonore. C’était la plus facile des trois à conduire, elle était sophistiquée et mise en valeur par un moteur central à 12 cylindres à plat qui allait bientôt céder la place au format V12 à moteur avant de la 550 Maranello de 1996. Une façon de se reconnecter à la 365 GTB4 Daytona.

Ci-dessus : la F512 M de 1994, dotée de quatre feux arrière ronds, était la plus facile du trio à conduire

Les trois versions ont été produites à près de 10 000 exemplaires au total, ce qui fait que cet illustre trio compte parmi les modèles à 12 cylindres les plus réussis de l’histoire de Ferrari. Parallèlement à ce succès historique, ces trois voitures restent curieusement d’actualité, comme tant d’autres choses des années 80 et 90.

Image de couverture : la légendaire Ferrari Testarossa de 1984 occupe le devant de la scène, flanquée de la 512 TR (à gauche) et de la F512 M (à droite)